Le Fonds monétaire international recommande au Cameroun de suspendre les dépenses non budgétisées de la Société nationale des hydrocarbures (SNH). Le but étant d’imposer une meilleure discipline budgétaire pour accompagner le programme triennal signé avec le Cameroun.
Parvenir à une totale transparence dans la gestion des recettes pétrolières par la Société nationale des hydrocarbures (SNH). Telle est l’exigence adressée par le Fonds monétaire international (FMI) aux autorités camerounaises, condition essentielle du programme triennal signé le 26 juin de cette année entre les deux parties. Le FMI a ainsi obtenu des autorités camerounaises qu’elles limitent les dépenses directes hors budget de la SNH. Le FMI a tenu à ce que cette exigence apparaisse noir sur blanc comme une des modalités du programme triennal (2017-2020) paraphé à la fois par cette institution bancaire internationale et les autorités camerounaises. « Des objectifs indicatifs sont fixés sur la réduction nette du stock d'arriérés intérieurs, des revenus non pétroliers et des dépenses sociales, ainsi que des dépenses hors budget de la compagnie nationale de pétrole (SNH) », peut-on lire dans le rapport qui entérine le programme triennal.
Pour le FMI, c’est une victoire certaine et pas des moindres. Depuis quelques années déjà, l’institution financière dirigée par la Française, Christine Lagarde recommande sans succès au Cameroun de lever l’opacité qui entoure la gestion de ses recettes pétrolières. En mars 2016, à l’occasion d’une visite de surveillance du FMI à Yaoundé, le dossier des dépenses hors budget de la SNH est à nouveau sorti des tiroirs. Dans le rapport qui a sanctionné cette visite, les experts du FMI indiquent que l’Etat camerounais doit « arrêter de recourir à la SNH comme mécanisme hors budget de dépenses par avance ». Et quand les mêmes experts parlent des risques qui pèsent sur l’économie camerounaise, ils reviennent à la charge en recommandant une fois encore aux autorités camerounaises « d’abandonner la pratique des circuits parallèles de dépenses via la SNH, qui nuisent à la discipline budgétaire ».
RECETTES
De toute évidence, à Washington aux Etats-Unis, les administrateurs du FMI sont convaincus que l’affaire de l’achat foireux d’un avion Boeing Bbj-II pour les déplacements du président camerounais n’est pas la seule dépense hors budget initiée par le Cameroun. A Yaoundé, personne ne conteste sur ce point. Le gouvernement expliquait cette année à une mission du FMI que ces dépenses hors budget sont souveraines. L’Etat camerounais a d’ailleurs usé de ce mécanisme pour financer la guerre qu’il mène contre la secte terroriste Boko Haram dans la région de l’Extrême-Nord. Mais ce n’est pas tout. Dans une enquête parue dans les colonnes de Jeune Afrique, on apprenait du magazine panafricain que la SNH est le principal bailleur de fonds du Bataillon d’intervention rapide (BIR), l’élite de l’armée camerounaise. Des confidences tirées à bonne sources font également savoir que les recettes pétrolières sont du domaine réservé et serve à financer divers besoins prioritaires. « C’est pour cette raison que le secrétaire général à la présidence de la République est toujours le président du Conseil d’administration de la SNH. En sa qualité de patron de l’administration du pays, il coordonne les renseignements et sait plus que quiconque l’utilité de ces revenus secrets », commente un observateur averti de la vie politique nationale.
DEPENSES
Cette année, le gouvernement camerounais a fait savoir au FMI qu’il n’est pas opportun d’arrêter avec les dépenses directes de la SNH. Pour lui : « les interventions directes de la société d'hydrocarbures de la Société Nationale des Hydrocarbures du Cameroun (SNH) permettent une réponse rapide et souple aux urgences vitales, principalement liées à la sécurité. En 2016, ces interventions représentaient 60 % des redevances pétrolières totales. Le gouvernement a l'intention de maintenir les interventions directes de la SNH à un niveau compatible avec les défis de sécurité auxquels le pays est confronté. Néanmoins, pour éviter un déplacement important dans les dépenses budgétaires annuelles prévues, nous limiterons ces dépenses à 50 % du montant des redevances SNH et réduirons progressivement ce plafond par la suite », comme on peut le lire dans le rapport qui sanctionne une mission du FMI en 2016.
RAPPORT
En attendant de voir si le Cameroun va respecter son engagement de plafonner les dépenses hors budget de la SNH durant les trois années que va durer le programme avec le FMI c’est la quantité des recettes pétrolières qui échappent au budget qui fait l’objet de tous les fantasmes dans les salons cossus de Yaoundé. A ce titre, le dernier rapport de conciliation de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (Itie) sur le Cameroun, paru en décembre 2016, est révélateur. Ce rapport, rédigé par le cabinet d’audit international Moore Stephens, indique que plus de 46 % des recettes pétrolières échappent au budget de l’Etat. Plus grave, ce chiffre est en constante augmentation, car seuls 35 % des recettes pétrolières échappaient au budget en 2011. C’est d’ailleurs cette progression permanente qui inquiète le FMI plus que par le passé.
Michel Ange Nga
http://newsducamer.com/index.php?option=com_k2&view=item&id=1181:petrole-le-fmi-exige-la-transparence-a-la-snh&Itemid=115