Jusqu’au 20 avril 2018 se déroule dans le Sahel le Flintlock, des manœuvres militaires internationales pour lutter contre le terrorisme. En 2017, seuls trois pays sahéliens ont participé à ces exercices. Mais en 2018, huit pays africains, dont les membres du G5-Sahel (Mali, Mauritanie, Niger, Burkina Faso et Tchad), et 12 pays occidentaux ont répondu à l’appel.
Des séances de démonstration ouvertes à la presse ont eu lieu au camp Général Bila Zagré à Kamboinsin au Burkina Faso. Le photographe Issouf Sanogo de l’AFP s’y est rendu.
Depuis le 11 avril 2018,
les antennes de formation et les manœuvres militaires du Flintlock, qui visent à renforcer les capacités opérationnelles des armées africaines, se déroulent simultanément au Niger, au Burkina Faso et au Sénégal, pays jusqu'ici épargné par les attaques terroristes. Coïncidence ou pas, dès le premier jour des manœuvres, un humanitaire allemand a été enlevé au Niger. Aujourd’hui, les recherches pour le retrouver sont au point mort.
Les membres du G5-Sahel
sont les principaux bénéficiaires de ces exercices. Même si les Etats-Unis participent avec 11 autres pays occidentaux (Autriche, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, France, Italie, Norvège, Pays-Bas, Pologne et Royaume-Uni), ils gardent une certaine distance avec le G5.
En juin 2017,
la France demande au Conseil de sécurité des Nations Unies d'approuver le déploiement de la force du G5-Sahel, explique GéopolisAfrique. La proposition est soutenue par la Russie et la Chine, mais les Etats-Unis et le Royaume-Uni se montrent réticents pour des questions de financement. L'administration Trump a affiché son intention de réduire de manière conséquente la contribution américaine au budget des opérations de maintien de la paix.
Si un accord est finalement conclu,
le Conseil de sécurité des Nations Unies adopte une résolution qui «salue le déploiement» de cette force, mais sans lui délivrer un mandat des Nations Unies, donc un financement, précise «Jeune Afrique». En octobre 2017, les Etats-Unis finissent par promettre une aide de 60 millions de dollars.
«Nous soutenons déjà les différents pays
qui participent à la Minusma (la force de maintien de la paix des Nations Unies au Mali). Dans l'avenir, je pense que nous travaillerons également avec les pays membres du G5 et sa force conjointe», souligne Eric Whitaker, ambassadeur américain à Niamey, cité par RFI. «L'exercice Flintlock 2018 vise à renforcer les capacités des pays de la région (sahélienne) à lutter contre les organisations extrémistes violentes (…), à protéger leurs frontières», ajoute l'ambassadeur.
«Daech touche à sa fin en Irak et en Syrie (...)
L'Afrique reste une de ces terres fertiles pour abriter des combattants. Il s'agit de permettre au G5 avec ses modestes armées de prendre en charge les menaces plus directement et plus efficacement (…), de faciliter la coopération régionale en matière de sécurité et de lutte contre les organisations terroristes», explique le général Mark Hicks, commandant des opérations spéciales des Etats-Unis pour l'Afrique (Africom). La nouveauté du Flintlock 2018, ajoute-t-il, «est que nous avons orienté les opérations de formation sur les menaces réelles présentes dans le grand Sahel».
Le Flintlock est organisé chaque année depuis plus de dix ans par l'Africom,
le commandement unifié pour l'Afrique créé par le département américain de la Défense pour coordonner activités militaires et sécuritaires des Etats-Unis sur ce continent. Représentants au total 1.500 hommes, les participants mènent des exercices tactiques de petites unités incluant des parcours de tir, des opérations aéroportées, des exercices de combats rapprochés... précise LeFaso.net, un site d'actualité du Burkina. Au-delà des activités purement militaires, Flintlock permet de réaliser également des activités civilo-militaires au profit de la population.
Ces manœuvres sont une opportunité
pour apprendre aux soldats des différentes armées de partager leurs expériences dans des domaines opérationnels. «Flintlock demeure le plus grand exercice militaire multinational d’opérations spéciales et d’entraînement entre Etats africains et partenaires occidentaux», ajoute le site Burkina24.
Mais comme le soulève
«Le Pays», un quotidien du Burkina, «on peut se poser la question de savoir quel est l’impact réel de ces opérations Flintlock en matière de sécurité dans nos pays.» Selon le journal, le terrorisme continue de se développer. «Et les populations, particulièrement celles de la bande sahélo-saharienne, vivent dans la psychose permanente.»
«D’aucuns, en tout cas,
n’hésitent pas à franchir le Rubicon en accusant les forces étrangères qui opèrent sous nos cieux, d’être à l’origine du mal, estimant que ce sont elles qui attirent les terroristes. Mieux, il en est né un courant souverainiste dans des organisations de la société civile dont certaines réclament ouvertement (le) départ» de ces forces, ajoute le journal.
«Le Pays» conclut:
«L’on peut penser que l’exercice est non seulement une foire pour marchands d’armes qui en usent comme une tribune de promotion de leurs marchandises, mais aussi une occasion d’accaparement des terres africaines pour des tests qui auraient pu difficilement être menés en Occident, en raison de la réglementation et des risques pour des populations bien averties de leurs droits. Quoi qu’il en soit, l’on peut considérer que ces opérations constituent un mal nécessaire.»
Par Laurent Filippi
geopolis.francetvinfo.fr